Un développement qui profite à tous ? Dawei

 

daweiProjectAncien et nouveaux projets : une région sous tension !

Dawei, c’est la région du projet Yadana,  premier projet en Birmanie d’exploitation du gaz en Birmanie. La société Total (et Unocal, qui se retira ensuite) signa avec la société mixte MOGE en 1992 un contrat d’exploitation partagée du gaz dans le golfe de Martaban. Le gaz est acheminé vers l’Eastern Sea-board près de Bangkok, par un gazoduc traversant les régions Karen et Môn sécurisé par 16 bataillons de l’armée. En plus des 15 millions de dollars versés à la signature du contrat par Total, de celui, inconnu des royalties, un impôt sur les bénéfices du projet est prélevé par les autorités Birmanes à hauteur de 30 % et des primes de rendement sont versées lorsque la production moyenne atteint certains seuils. Depuis 1998, les ventes de gaz  en provenance de Yadana à la Thaïlande procurent  400 MUSD par an, une part importante du budget de l’état. Les Karen sont en rébellion depuis l’indépendance pour la reconnaissance de leurs droits et de leur culture. Une grande partie a fui en Thaïlande ; le projet Yadana était l’occasion pour la junte, de venir à bout de cette opposition.

Selon l’Observatoire Géopolitique de la Drogue (OGD), le contrat passé avec Total et le partenaire birman la MOGE (Myanmar Oil & Gas Entreprise), a entraîné des versement en devises permettant le blanchement d’argent, le principe étant de justifier toute dépense par ces versements. Quatre dépenses identifiées, pour un montant de 60 MUSD ont permis l’achat à la société polonaise PZL de 24 hélicoptères d’occasion  en 1992. Total et Unocal ont été mises en cause par des birmans qui ont porté plainte devant les tribunaux français et américains pour travail forcé. La difficulté pour les journalistes d’enquêter a entraîné une grande confusion. D’une part, Aung San Suu Kyi, leader de l’opposition,  demandait le retrait des investisseurs étrangers, affirmant que la société Total était, le principal soutien financier du gouvernement birman ; d’autre part, Total communique sur les 6 MUSD consacrés au projet socio-économique sur 13 villages, seul projet de développement intégré du pays et se réfugie derrière l’argument que les investisseurs étrangers ne sont pas là pour faire de la politique.

Les enquêtes  montrent que le travail forcé a bien été utilisé, non pas directement par les sociétés étrangères, mais lors de la construction des infrastructures du projet et que Total ne pouvait pas l’ignorer. Le 30 novembre 2005,  Total  choisit d’indemniser tous les plaignants, précédée dans cette décision par Unocal aux Etats-Unis. La polémique a perduré et aura, au moins attiré l’attention au niveau international sur les pratiques de l’armée en Birmanie, le pays en général, mais aussi sur les implications des investissements étrangers dans ce pays.

Les nouveaux projets…

Le projet de Dawei : port en eaux profondes et zone spéciale économique. a été approuvé en mars 2010, et concerne la construction du plus gros complexe industriel d’Asie du Sud-est, intègrant un port en eaux profondes 6 fois plus important que celui de Rayong en Thaïlande, (contrat attribué à Max Myanmar Group of Companies), des autoroutes, une voie ferrée, un oléoduc et un gazoduc, une centrale à charbon et une zone industrielle (Special Economic zone, SEZ) de 250 km2 (et situé dans une zone de conflit. Suite aux protestations, la construction de la centrale à charbon (4 000 MW) a été arrêtée le 10 janvier 2012 et un autre combustible doit être proposé par le constructeur. Les bulldozers ont, par contre, démarré les travaux de la route qui mènera au déplacement de 10 000 personnes. près de 3 000 maisons. Les activistes réclament clairvoyance et justice autour du projet. L’investisseur majoritaire Max Myanmar s’est retiré du projet mais 3 accords ont été signés entre la Thaïlande et la Birmanie, faisant redémarrer le projet.

Le coordinateur de Dawei Development Association (DDA), affirme que le projet va causer le déplacement de 30 000 personnes pour construire la Special Economic Zone, raison pour laquelle il demande à avoir connaissance des accords. Le dessin montre un énorme centre industriel pétrochimique. Les activistes protestent aussi contre les indemnités très insuffisantes et inférieures de moitié à celle données ailleurs.  A l’Est du projet, les Karen reçoivent l’équivalent de US$ 340 par plant d’hévéa perdu alors qu’à l’Ouest, ils ne reçoivent que US$ 170. ITD (Italian Thaï a d’abord reçu du gouvernement  birman une concession pour 75 ans en 2008.

Ce type de projet, selon les économistes, profite essentiellement aux investisseurs. ITD est l’investisseur principal de la Dawei Special Economic Zone. L’investissement d’ITD (construction de la zone et port en eaux profondes de Nabulal, Dawei province, s’élève à US $ 8,6 milliards sur les 58 milliards d’investissements totaux. De nombreuses sociétés étrangères travaillent sur le projet, bénéficiant de coûts de main d’œuvre très bas et de peu de contraintes concernant l’environnement. Ils ont reçu le terrain du gouvernement Birman pour 60 ans pour un projet qui touche 21 villages, soit 32 274 personnes et 3 977 maisons. Au début du projet, aucune information n’a été donnée à la population et, lorsque les expulsions ont commencé, les villageois ont refusé les compensations poussant ITD à transférer le problème des compensations au gouvernement Birman, ce que refusait aussi la population à cause de la corruption. Le projet doit être complété par une route qui rejoindra  Bangkok, investissement évalué à US $ 10 millions dont 54 % seront financés par ITD, permettant d’éviter le détroit de Malacca pour les marchandises venant du Moyen Orient, notamment le pétrole.

Un projet similaire moins important était en préparation en Thaïlande a dû être abandonné en raison des protestations de la population. Les sociétés Birmanes impliquées sont Max Myanmar et Dawei Development Company (joint-venture entre ITD et MM). 19 villages devront être relocalisés, dont 23 édifices culturels et religieux, 21 écoles. Le chantier occasionne des problèmes de prostitution. La KNU a discuté de ces problèmes avec ITD et le 15 décembre 2011. Le 7 janvier 2012, la Dawei Development Association (DDA) a envoyé une lettre au Premier Ministre Thaïlandais Yingluck Shinawatra. “We don’t want this project. They want it. So don’t do it in our region”.

Source : http://www.scoop.co.nz/stories/WO1111/S00051/burma-draft-land-law-denies-basic-rights-to-farmers.htm,.http://www.salweenwatch.org/index.php?option=com_content&view=article&id=192:khoe-kay-biodiversity-in-peril&catid=37:publications&Itemid=66.
Land, water, rights, Earthrights International : Voices from the Tibetan Plateau to the Mekong Delta, Washington,  2012