J’avais pris l’habitude de venir chaque année dans ces villages, suffisamment proches de Kengtung pour pouvoir faire la marche dans la journée et revenir pour la nuit, condition obligatoire à l’excursion. Une fois, quand je demandais comment allaient les choses dans le village, on me répondit qu’il n’y avait plus de riz… et pas d’argent pour en acheter. Je demandais s’il n’y avait pas à acheter ces petits collier de paille faits par les femmes au moment de la récolte et qu’elles portent par dizaines au cou. Après un moment de surprise, elles allèrent chacune chercher les colliers, emballés dans du papier journal, se mirent ensuite d’accord sur un prix. Une vieille femme parla en enfournant dans la poche de sa chemise les billets que je lui donnais et je demandais au guide de traduire. « Ma grand-mère a eu de l’argent, ensuite, il n’y en a plus eu, et voilà le premier billet pour moi, c’est un grand jour ! »
La fois suivante, je revins en août, le jour de la fête du Nouvel An Lahu. Nous avons franchi la porte du village rénovée, portant de nombreuses armes en bambou, tournées vers l’extérieur du village. Le village entier portait une tenue neuve, bleu vif et blanc. Le chamane avait installé un totem décoré à l’extérieur, et un petit autel dans une des cases en bambou ; nous les avons laissés à leur célébration dans la musique et les danses des jeunes…